Caravanes

par Françoise Dufournet
19891990, in La Revue des revues no 8

« Les caravanes aujourd’hui désertent les déserts et peuplent les chimères, les élans, les secrets qui nous sont nécessaires… Les vrais trésors ne sont plus d’or ni d’argent ni de soie… Ce sont les contes, les chants, les mots calligraphiés, les images et les fables qui forment désormais les richesses d’échange, et fomentent aussi les itinéraires…»
L’écriture, ici, comme métaphore du voyage pour une revue de «pure littérature, grande ouverte sur le monde ». Sur le thème de l’AILLEURS, autant que de NULLE PART -« le bout du monde n’existe pas »- voici, superbement éditées, des pages, qui nous convient au départ, loin des mondes confinés dans l’étroitesse des lieux et des temps.
Une fois l’an, à l’approche des beaux jours, les éditeurs donnent rendez-vous à leurs lecteurs pour un tour du monde de textes écrits par quelques «marcheurs de l’esprit ». Des écrivains uniquement d’espèce vagabonde, célèbres ou non, contemporains ou antiques, composent une mosaïque de récits, de poèmes, de nouvelles.., se jouant de l’espace et du temps : des français, nombreux (André Velter, Gilles Lapouge, Claude-Michel Cluny, Alain Borer, Nicolas Bouvier, Jean-Paul Guibert, Claude Herviant…) ; un écrivain majeur de la littérature hongroise (MikIos Szentkuthy) ; un chapitre inédit de T.H. Lawrence (Les sept piliers de la sagesse) ; des poètes chinois du VIIIe et du Xe siècles (Li Ho et Houai-Tsong) ; mais aussi des conteurs perse, afghan, syrien du Xe siècle, ou contemporain (Adonis), iranien (Sadaq Hadayaf), balte (lsmaël Kadaré), etc.
Dans tous les cas, des oeuvres censées parler à l’imagination du lecteur invité au voyage, aidé en cela par une présentation indispensable de chaque auteur permettant de le situer par rapport à son temps, à son pays. Dépaysement assuré, en outre, par des pleines pages de calligraphie chinoise (Houei, Tsong du XIe siècle), ou arabe (Hassan Massoudy, né en 1944 en Irak du sud). Détail qui souligne le travail soigné d’éditeur : chaque texte se clôt élégamment sur le motif, toujours renouvelé, d’une plume ancienne. Une volonté de cosmopolitisme, donc, parce que cette nécessaire diversité, «est encore le meilleur antidote contre les excès de l’intolérance intellectuelle ou esthétique ».


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