{L’Autre côté}

par François Bordes
2009, in La Revue des revues n° 43

Couverture blanc sur noir et noir sur blanc, mise en page minimaliste sur trois colonnes, format A4 : le premier numéro de {L’Autre côté}, paru durant l’été 2009, fait le choix de l’austérité et de l’économie de moyens graphiques.
Du texte avant toutes choses : tel semble être le parti pris. Il correspond d’ailleurs parfaitement à la ligne éditoriale définie. L’objectif de cette nouvelle revue est énoncé clairement : « Proposer aux lecteurs français un autre paysage intellectuel que celui qui leur est habituellement offert par la presse écrite ».
{L’Autre côté} – à ne pas confondre avec la revue De l’autre côté – entend ainsi « permettre à son lectorat de renouer avec un véritable état d’esprit critique » en publiant articles, comptes rendus et entretiens « avec des personnalités rarement exposées dans les médias ». La revue se propose avant tout « d’adopter une langue claire et rigoureuse afin d’éclairer les problèmes au lieu de les obscurcir ».
{L’Autre côté} part donc à l’attaque ; et le premier assaut est mené contre la « French theory et ses avatars ». Séverine Denieul, la directrice de publication, invite les lecteurs à « résister à cette mode du temps ». D’emblée, nous voilà dans la polémique, celle qui chauffe et échauffe les esprits. Le jeu de massacre est parfois très réussi (S. Denieul sur Alain Badiou et sur les Gender studies, ou Adam Kirsch sur Slavoj Zizek), d’autres fois moins (Dan Sperber sur « l’effet Gourou »).
Grand Foucaultphobe, Jean-Marc Mandosio fulmine contre ceux qu’il appelle les « foucaultphiles » et les « foucaultlâtres ». On a connu mieux de la part de l’auteur de « L’Effondrement de la TGBNF ». Certes, c’est la loi du genre.
Le pamphlétaire a ses bons et ses mauvais jours. Tombent joyeusement les têtes de pipe ou plongent les idées dans un lac de vinaigre. Aux lecteurs de juger dans quelle catégorie ranger l’attaque portée ici. L’article de Kirsch sur Zizek, paru originellement dans The New Republic, s’achève sur ces mots : « Il y a des gens avec qui le débat n’est ni possible, ni même nécessaire ». Peut-être aurait-il été profitable de méditer plus longuement ce sage principe plutôt que s’acharner contre une « mode du temps » ? « L’autre paysage intellectuel » annoncé reste, pour l’heure, loin du champ de vision. Le prochain numéro interrogera peut-être plus directement les oeuvres dont semble se réclamer {L’Autre côté} : Raffaele La Capria, Annie Le Brun, Georges Orwell et quelques autres, parmi lesquelles la philosophe américaine Martha Nussbaum. Réjouissons-nous, en tout cas, de voir paraître une nouvelle revue de critique intellectuelle si ouvertement engagée dans la french polemic.


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