Place aux sens

par Hélène Favard
2002, in La Revue des revues no 31

Avril 2001-mars 2002 : en quatre livraisons, format et papier journal, Place aux sens s’est installée dans le champ des revues littéraires engagées et militantes. Dans son premier éditorial, Jean-Yves Guigot annonce clairement la couleur en affirmant que la revue cristallisera désormais tout acte de résistance et de révolte. Deux maîtres mots qui indiquent la direction à suivre, pour aller dans le bon sens, celui de l’opposition à la pensée unique et formatée. La revue s’inscrit donc dans un cadre qui permet de redonner vie aux sens, à tous les sens (aux émotions mais aussi à ce qui « fait sens ») en prenant le temps de la réflexion et en refusant de se soumettre au diktat de la vitesse qui caractérise nos sociétés. « Résister, c’est aujourd’hui prôner la lenteur. » L’analyse et l’acte de création dans la temporalité de leur élaboration étant considérés comme ce qui fait le terreau de la résistance. Un découpage en quatre rubriques : Essais / enquêtes, Ailleurs (autres cultures, autres écritures), Poésie / nouvelles et Regards (sur d’autres revues ou sur des ouvrages publiés par de petites maisons d’édition) préside à l’organisation générale de la revue.
Placé sous le regard protecteur des grandes figures de la pensée militante des années soixante, soixante-dix (Sartre, Deleuze, Foucault et Debord) le premier numéro de Place aux sens donne également à découvrir la poésie contemporaine des Indiens d’Amérique du Nord. Dans sa dernière livraison, la revue consacre un éditorial à György Lukacs et reprend, à son compte, auprès d’auteurs contemporains (Frédérik Tristan, Marc Petit, Nicolas Brard, Giséle Prassinos, Rémi Boyer, Sébastien Doubinsky, Jehan Van Langhenhoven, Alain-Pierre Pillet et Alain Helissen) une enquête que René Daumal avait proposée à La NRF de Jean Paulhan avant la guerre : « Quelle est l’expérience fondamentale ou fondatrice que vous jugeriez à l’origine de votre écriture ? »
« Maîtres à lire », selon l’expression d’Olivier Pascault, le rédacteur en chef, ou maîtres à penser, selon l’expression consacrée : les figures tutélaires de la pensée et de la création du XXe siècle guident ainsi – à chaque livraison – les pas du lecteur dans la découverte d’auteurs contemporains.


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