Sud/Nord

par Jacqueline Pluet-Despatin
1994, in La Revue des revues no 18

Titres et sous-titres de cette nouvelle revue annoncent non pas un programme en bonne et due forme mais, ainsi que l’écrit Francis Jeanson, membre du comité de rédaction, des « signes de piste » pour une réflexion dont la clé est la nécessaire altérité de l’être humain, sa condition pour que chaque conscience accède au monde. La démarche initiale part d’un double constat : d’une part la « mystification du dialogue Nord-Sud » qui ne recouvre en fait que l’imposition au Sud de l’ordre mondial du Nord et d’autre part la folie du monde. Or ce désordre du monde peut-il être seulement chiffré, doit-on se contenter, comme les économistes l’enseignent, d’en analyser le coût en termes purement économiques ? Certes, on ne peut nier le phénomène de mondialisation, mais la question est de savoir si celui-ci traverse les sociétés de part en part ou bien si celles-ci sont encore détentrices de pouvoirs culturels. Auquel cas, il convient d’en analyser les spécificités et les articulations.
À l’origine de la revue, un groupe de psychiatres, sensibles au caractère multidimensionnel de toute crise humaine et désireux de sortir de leur spécialité ainsi que de leur aire culturelle. D’où la rencontre avec des chercheurs d’autres disciplines et d’autres cultures, rencontre que la revue reconnaît un peu volontariste en ses débuts, mais qu’elle espère construire au fil des numéros : pour cela, le comité de rédaction s’appuie sur des « correspondants nationaux » appartenant au Maghreb, à quelques pays d’Afrique, d’Amérique latine et d’Europe (surtout d’Europe du Sud) et sur un « conseil scientifique » dont cependant plus de la moitié des 31 membres sont domiciliés en France. Creuset d’échanges, chaque numéro de la revue aura pour tâche d’élaborer un langage commun entre le Sud et le Nord et se veut un pari pour dépasser les actuels clivages.
Au sommaire de cette première livraison qui a pour thème Ordre, désordre, folie, un hommage à Georges Hahn, qui créa le département des sciences humaines chez Privat à Toulouse, avant de fonder en 1982 avec Jean Sacrispeyre la maison d’édition Érès. C’est là qu’il accueillit la revue et assista de ses conseils les premières réunions du comité de rédaction. La mort devait l’empêcher de voir la publication de ce premier numéro.
Vient ensuite le manifeste « Sud/Nord » de Francis Jeanson, puis l’éditorial de Michel Minard et Edmond Perrier, suivi de textes de Loup Verlet, Abdelhak Benouniche (psychiatre, université d’Alger), Bernard W. Sigg, Sami Naïr, Jean Duvignaud, Claudio Magris, Sébastien Giudicelli, Michel Fennetaux, Bénamar Mediene (sociologue, université d’Oran), Aldo Martin (psychiatre, Uruguay) et d’un entretien avec Rachid Boudjedra, réalisé à Alger en novembre 1993. La revue consacre un dossier, « À la recherche de l’homme musulman » qui est un résumé par Robert Berthelier de son livre (L’Homme maghrébin dans la littérature psychiatrique) et se clôt sur une « Chronique du lecteur égaré » où jean Naudin parcourt quelques livres, revues, expositions.
La revue, dont la maquette éditoriale est encore en devenir, semble s’orienter vers des numéros à thèmes, qui déjà s’annoncent : Aliénations ; Créativité, création ; Enfances.

 

Coordonnées de la revue


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