Quêtes littéraires

Honoré Daumier, « Le Soulèvement » © CC0/Domaine public/Wikipedia

 

L’on pourrait croire que cette revue se joue de clichés. Rien n’indique en couverture qu’il s’agit d’une revue d’études françaises, rien d’écrit, mais ce clavier d’accordéon frappé des couleurs du drapeau tricolore oriente l’imagination. À bien regarder, il s’agit d’un clavier de machine à écrire, photographie posée sur une liste comme effacée d’auteurs français, que des encadrés rendent plus lisibles. La maquette de cette revue annuelle a peu varié, depuis 2011 : la couleur de fond et son camaïeu seuls varient.

 

Si le titre est explicite – la revue propose des articles sur les littératures française et francophones –, c’est en quatrième de couverture que les éditeurs intriguent : KUL Katolicki Universytet Lubelski Jana Pawla II et Werset (éditions). Donc c’est une revue polonaise ? Non, c’est une revue faite à partir de la Pologne. Procédant par appel à textes, (pour le prochain numéro, « La Bible », il vient de se clore), la revue accueille des auteurs du monde entier. Cela se vérifie souvent – Ent’revues est dépositaire d’une collection entière : merci aux éditeurs, à Edyta Kociubińska, sa rédactrice en chef.

 

Le numéro 13 (2023), « Jeu en littérature, littérature en jeu » accueillait 17 auteurs, pour cinq d’entre eux d’établissements français, et dessinant une carte vaste, européenne et aussi asiatique (Chine, japon), jusqu’en Nouvelle-Zélande : Chandniée Chandranandinee Tushar Iyengar (Erevan), Servanne Woodward (Western Ontario), Aude Lecimbre (Lille), Jingxuan Pan (Sorbonne université), Zeina Hakim (Genève), Shoshana-Rose Marzel (Callège académique de Safed, Israël), Ryan Atticus Doherty (Louisiane), Joël Loehr (Sichuan), Françoise Bombard (Académie Giraudoux, Limoges), Paweł Kamiński (Université de Silésie à Katwice), Wenjing Zhao (École normale supérieure de l’Est de la Chine), Aristide James (Université Lyon 2), Shuichiro Shiotsuka (Université de Tokyo), Paméla Baës (Universitédu Littoral-Côte d’Opale), Antoaneta Robova (Université de Sofia « Saint Clément d’Ohrid »), France Grenaudier-Klijn (Université Massey, Nouvelle-Zélande), Anna Opiela-Mrozik (Université de Varsovie). Cet index propose déjà des voyages.

 

Joël Loehr parcourt trois siècles, à propos du burlesque : « Le jeu déréglé du burlesque : du Roman comique (1651) à Molloy (1951) ». La littérature classique ouvre le jeu avec Racine, Prévost, Marivaux, Diderot et Zola ; un texte traite du bilboquet ; les plus rares Péladan ou Crommelynck (Le Cocu magnifique) sont présents ; Genet ou Leiris, Queneau ou Perec (abordé via le livre de Ruth Zylberman) nous amènent à la contemporanéité : voici Emmanuel Carrère, Éric-Emmanuel Schmitt et Patrick Modiano, jusqu’à Sophie Divry, née en 1979. Territoires littéraires, territoires temporels : les pistes de réflexion ne manquent pas.

 

Est-ce parce que le numéro 14 de 2024 propose un sujet éminemment politique sur une période plus restreinte que la majorité des douze auteurs est française ? Seuls Agnès Élthes (Budapest) et Adrián Valenzuela Castelletto (Bergame, mais aussi Sorbonne Université) apportent un regard extra-hexagonal. Il s’agit de « La révolte dans le roman du second XIXe siècle », thème spécifique sur une période riche mais restreinte. Erckmann-Chatrian ouvre le sommaire, Zola, le naturalisme, emboitent le pas. Nous rencontrons ensuite Paul Bourget, Robert Caze, Rosny ainé ; Léonie Rouzade, Rémy de Gourmont (Bonjour, Vincent Gogibu !), Vallès-Mirbeau-Darien, en groupe ou séparés et Léon Bloy pour finir auront nourri des travaux fouillés, précis.

 

Yannick Kéravec 

 

Coordonnées de la revue

Thèmes des numéros :

La révolte dans le roman du second XIXe siècle, no 14 (2024)

Jeu en littérature, littérature en jeu, no 13 (2023)

Mémoire(s), no 12 (2022)

Utopie : entre non-lieu et contrée idéale, no 11 (2021)

Caricature : l ’art de la démesure, no 10 (2020)

Maître(s) et disciple(s), no 9 (2019)

Au croisement des vanités, no 8 (2018)

Le silence en mots, les mots en silence, no 7 (2017)

Hybride(s), no 6 (2016)

De l’image à l’imaginaire, no 5 (2015)

Sur les traces du vagabond, no4 (2014)

Entre le sacré et le profane, no 3 (2013)

Aux confins de l’absence, no 2 (2012)

Écrire l’absence, no 1 (2011)

 

Signalons que la revue s’inscrit dans l’association AIEF (Association Internationale des Études françaises), qui trouve à s’exprimer dans… une autre revue, publiée chez Classiques Garnier.