La moitié du fourbi : écrire petit

 

Ce n’est pas parce qu’on est petit qu’on mérite de passer inaperçu. Et ce serait vraiment bête quand on s’appelle La moitié du fourbi avec un premier numéro qui s’avance sous cette bannière : «Écrire petit». Et ça grouille : 18 variations composent une sommaire infiniment inventif. Les écritures microscopiques de Werner Herzog dans ses carnets du tournage effroyable de Fitzcarraldo (Anthony Poiraudeau), les pattes de mouche – écho de la mimographie hébraïque ? – de Walter Benjamin (Zoé Balthus), la déambulation aussi minutieuse que rêveuse de Gilles Ortlieb dans le dédale des rues parisiennes (rue de la Petite-Pierre, l’impasse du Petit-Modèle, rue du Petit-Musc…), au rythme des SMS retranscrits par Sylvain Prudhomme, le bruissement de la vie qui bat au matin du 11 septembre 2001 avant l’effroi, 2 variations Walser…Mais encore Thomas Vinau et sa dilection pour les « petits riens », ou, variation du gros au maigre, Jacques Jouet qui naturellement oulipise…On n’en dira pas plus même s’il y aurait encore de quoi enfler (Michaux, Bruno Dumont…et les Pygmées) cette petite note. Ajouter ceci : une vivacité de ton, d’allure emporte les courts textes graves ou légers (de l’humour aussi), de création ou d’analyse, emballe la lecture et réjouit le lecteur : «littérature et appels d’air», sous-titre ajusté de la revue. Chapeau à Frédéric Fiolof – qui livre un texte sur les illisibles «c’est bien pourquoi il faut les lire » Carnets de Monsieur M. – pour avoir su agencer, de manière si neuve, cette machine à distribuer de petits bonheurs.

 

Frédéric Repelli