« Vivre la catastrophe », Communications, n° 96

La catastrophe sidère. Elle nous confronte à ce qui apparaît comme « mortifère, impensable et impossible ». Pour la penser et tenter de comprendre ce qu’elle nous dit, la revue Communications publiée au Seuil par le Centre Edgar Morin consacre un numéro au sujet. Dirigée par l’anthropologue et dramaturge Yoann Moreau, cette livraison rassemble dix contributions parmi lesquelles un article de Frédéric Neyrat sur le « cinéma éco-apocalyptique » ou une conférence de Michaël Ferrier sur le geste artistique à l’époque de Fukushima – ou « De la catastrophe considérée comme un des beaux-arts ». Dans un entretien, François Laplantine expose ses analyses concernant l’importance du subir. Depuis peu, l’anthropologie s’intéresse en effet « au subir, au pâtir et au passif ». La catastrophe génère du décept, du renoncement à l’abstraction et au concept. S’appuyant sur les pensées de Georges Devereux, Roger Bastide et Axel Honneth, François Laplantine trace des perspectives stimulantes pour les sciences humaines, les sciences du langage et la création artistique. La « passivité active », les « pôles faibles », les travaux échappant à l’illusion orgueilleuse de la maîtrise absolue permettent une remémoration et une rescénarisation post-traumatique. Le subir permet alors de résister à la sidération de l’agir – et de survivre ainsi à la catastrophe.

 

François Bordes