Volailles et ses drôles d’oiseaux

Une revue énergumène. Tout à fois séduisante et rebelle à l’image de sa mise en pages/mise en scène constamment inventive, jouant du bleu tendre pour nouer des surprises dans la typographie comme le traitement des images. La vivacité de ses choix graphiques résonne avec l’objet même de la revue menée par Thomas Ferrand : accueillir toutes les formes du spectacle vivant contemporain. Longs entretiens, cartes blanches, carnets de travail trament ainsi une revue unique en son genre dont les artistes sont à la fois acteurs et sujets. Volailles privilégie la jeune scène, habitée par des artistes qui n’aiment rien tant que l’hybridation : plus de frontières entre les disciplines (danse/théâtre/vidéo) confondues dans des créations hors limites.  Le novice apprendra à épeler des noms d’artistes, de troupes, de collectifs dont il fera sans doute la découverte. Ainsi dans son numéro 4, le collectif Berlin, en réalité anversois, le metteur en scène Mohamed El Khatib (vers un roman graphique), le collectif Gens d’Uterpan (deux chorégraphes : Annie Vigier et Franck Apertet), chorégraphes encore Volmir Cordeiro (« le corps est le sol de ma parole »), Bahar Temiz, et son regard sur la Turquie à l’heure de la place Taksim… D’autres, beaucoup d’autres : ainsi Phia Ménard – artiste multiforme, multirisques –  qui fut naguère un Philippe. Philippe/Phia : rien qui soit fixe ou figé sur les scènes du spectacle vivant. Défi aux mirages des identités corsetées. On lira, en miroir, «latentatived’épuisementd’unepresseculturelle», calme démontage (presque un décalque) des articles des quotidiens par le metteur en scène Thibaud Croisy : critique de la critique épuisée. De la critique qui caquette : en somme, le contraire de Volailles.

 

Frédéric Repelli