

François Bordes l’avait déjà évoquée dans le Quartette #16. Cette revue nous est apparue à l’occasion d’un lancement à la librairie EXC. Beaucoup de curiosité précédait donc cette rencontre.
Ce titre claquant ses allitérations intrigue, n’est-ce pas ? Du zinzin au zinzolin, zinc ou zad, camarades. Et pourtant, pour d’aucuns, ce n’est pas un imaginaire qu’il convoque, mais une réalité. Une géographie. La réponse se trouve page 78.
Puis il rime avec Christophe Le Gac. Tiens tiens, se dit Boris Lebreton. Un mien cousin ? Ce ne serait pas absurde : la revue nous vient de l’ouest, d’Angers, initiée par Rozenn Le Roux. Un nouvel indice de celtitude.
Et puis ce nom de Christophe Le Gac trotte en tête : mais oui, nous nous sommes croisés, il y a longtemps, autour du journal d‘architecture Parpaings chez Jean-Michel Place, avant qu’il ne parte créer Archistorm (il a été aussi à l’origine de Stream). Dans ses nombreuses vies, il est aujourd’hui – entre autres –, enseignant à TALM École supérieure d’art et de design, à Angers.
Rozenn Le Roux en est fraichement diplômée. Elle développa pour un mémoire une œuvre écrite, ce qui amena son enseignant à l’encourager à publier. Mais comment ? Où cela ? Eh bien, créez votre lieu de pages : ZinZac était en germe.
Un éditeur, Naima, accepte d’accompagner le projet : ZinZac est née.
Et c’est une splendeur !
Un beau volume sur papier bouffant, 240 pages de 21 x 28 cm, laissant large place aux textes (merci pour les vieux yeux, presbytes comme les miens. L’on pourrait même trouver souvent le corps du texte un peu trop gros !).
La couverture est noire, mate au lettrage avec motif d’un beau gris, que l’on croirait argenté. Elle laisse voir les coutures de l’ensemble sous le rabat de couverture au motif élégant. Un premier ensemble de pages en couleurs évoquent manifestations et revues amies, porte des remerciements, accueille trois œuvres graphiques (tiens, Lohengrin Papadato ! Vous souvenez-vous de Klaatu ? de Faros ? Ithaac ?).
Et puis vont se succéder une danse typographique, une ronde de textes qui, d’une mise en page propre à chacun, verra le noir le blanc s’alterner, se décliner, les tailles et calages, marges et encadrés (parfois funèbres) s’adapter aux poèmes, aux textes et citations. La poésie, les arts, entretiens et essais, la philosophie également surgissent, se mêlent et composent un bonheur de lectures dans le désordre. La typographie tâche de rendre compte des ruptures et changements de ton dans la transcription d’une conférence d’Alain Damasio. Le passé (Gilgamesh) côtoie le contemporain (Marlène Tissot : trois lignes), les signatures relevées par François Bordes (Hocquard, Haenel, Gracián, Holderlin, Lucrèce et Novarina), et aussi Hubert Haddad, Yahia Belaskri, voisinent avec de nouveaux talents (Brice Templereau, diplomé 2023 de l’ESAD Angers). Des enseignants sont accueillis, pour de courts textes (Alexandre Castant, Fabien Vallos). Une page en vietnamien intrigue, l’allemand de Holderlin est lui traduit en vis-à-vis. Céline Ménager déploie sur trente pages « Hanter – Ante », récit poétique où la musique de la jeunesse tient la part belle.
Rozenn Le Roux : nous la retrouvons par trois fois, pour les extraits d’un roman, « De Vase et d’ouragans », et d’un essai « Siduri l’éternelle » qui font surgir familles et mères, des Zinzac aussi, tribu à définir.
Christophe Le Gac ferme le ban, par la rubrique Ekphrasis, compte rendu de lecture de Bleu Bacon, de Yannick Haenel : il est étonnant de retrouver une forme plus classiquement revuistique, en trois sages colonnes sur une page. Mais il lui succède par le même auteur le « début » d’une nouvelle, évoquant un futur de science-fiction, aux derniers mots : « à suivre ».
Nous sommes tout à fait d’accord !
L’ultime mot du tout dernier texte, poème signé Baltasar Gracián en 1651 est « Adieu ».
Pourvu que ce ne soit qu’un « au revoir ».
Boris Lebreton