Québec littéraire

par Fulvio Caccio
1989, in La Revue des revues no 7

Avec son élégante maquette noire illustrée d’une photo-couleurs qui évoque Magritte, Le Québec littéraire vient consacrer la rapide ascension de la maison Guérin littérature au sein du monde éditorial québécois. Si les revues sont relativement nombreuses au Québec, rares toutefois sont les éditeurs littéraires qui se hasardent à diversifier leurs activités de la sorte, l’inverse étant plutôt la règle.
Autour du directeur, l’homme de théâtre réputé Jean-Claude Germain, s’est regroupée une équipe de collaborateurs chevronnés provenant d’horizons divers : l’enseignement collégial, l’histoire, la radio, la scène, la musique. L’objectif de cette publication au format agréable (18 x 25 cm) est clair : redonner te goût de la bonne lecture. « Je lis donc je vis », affirme d’entrée de jeu le slogan de Québec littéraire qui se place sous l’aile tutélaire de feu le Docteur Jacques Ferron, subtil et ironique prosateur, l’un des meilleurs du Québec. Pour ce faire, la revue se propose d’abord d’être « un plaisir simple », l’expression « d’une liberté ». Son esprit est « celui de l’affinité et de l’amitié » : sa pratique, « celle de la tolérance pour la différence, la divergence et la dissidence ». Les 222 pages, abondamment illustrées, se divisent en six parties d’inégale longueur. « Le Journal de l’Isle Lettré », pot pourri de mots d’auteurs réels ou imaginaires, donne le ton de l’humour pratiqué au fil des pages. Mais cet esprit carabin masque mal le climat de deuil qui hante ce numéro inaugural. En effet, plus d’un texte fait directement ou indirectement référence à la disparition d’un être cher. Un autre thème revient de manière récurrente : le passé. Dans la section « Extraits », consacrée aux publications récentes, la majorité des textes choisis y font directement référence. Dans ce contexte, l’Histoire ne pouvait être absente. Des chercheurs ou des témoins de l’époque nous brossent sous forme d’enquête, de mémoires, d’essai quelques facettes méconnues de ce passé récent oublié. On y évoque entre autre l’émigration canadienne française vers le nord-est américain au début du siècle, l’immigration italienne au Québec, etc.
C’est habituellement dans les « brèves» qu’une nouvelle revue secrète son venin contre le milieu littéraire et affirme ainsi son caractère, sa différence. Malgré le titre prometteur de l’une d’entre-elles, « violences », les chroniques de Québec Littéraire restent, somme toute, trop sages. Et bavardes. Une lettre inédite de Ferron vient clore ce numéro qui capte néanmoins un certain état d’esprit du milieu littéraire québécois en cette fin de décennie,


Partager cet article