Guide des revues : commercialiser sa revue

Le système du dépôt

Par défaut de diffuseur et de distributeur, beaucoup de revues utilisent le système du dépôt-vente chez le libraire.

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C’est avec le libraire que vous discuterez la remise sur les ventes de votre revue. Dans les usages, sa fourchette se situe souvent de 33 % à 35 %. Mais le libraire peut exiger davantage : en effet, vous lui demandez d’effectuer une opération particulière, pour laquelle il devra faire un suivi spécifique. Il peut vouloir que ce service soit rémunéré : la remise peut dès lors atteindre 40 %.

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Le système du dépôt a divers inconvénients et limites.

Il suppose de votre côté un suivi et une vigilance sans faille : relever le dépôt, le renouveler si tous les exemplaires sont vendus, facturer les ventes (et éventuellement hélas relancer le libraire « oublieux »). Ensemble d’opérations à renouveler à chaque parution…

Et bien entendu, il est difficile de couvrir l’ensemble du territoire avec ce système artisanal.

Mais peu à peu une fidélité réciproque s’instaurant, les rouages de cette collaboration entre animateur de revue et libraire peut se révéler un système fécond et fluide permettant petit à petit gagner de nouvelles librairies : internet en ce domaine s’avèrera un allié utile.

Diffusion et distribution

Dans le chaine de commercialisation, ce sont les deux pièces maîtresses dans la relation avec le libraire :

– Le distributeur assure la gestion physique des ouvrages : il en gère les stocks et les flux. Il reçoit du libraire ou du diffuseur les commandes, en assure le suivi et la facturation. Il reçoit les retours (invendus) et recouvre les créances.


– Le diffuseur représente votre production auprès des libraires. Il présente vos nouveautés. Il peut désormais à côté de visites physiques enrichir son travail de promotion par l’envoi de lettre électronique. La diffusion est une activité coûteuse qui suppose une équipe de représentants assez fournie si elle prétend couvrir l’ensemble du territoire et les points de ventes de qualité.

Si on ajoute la remise du libraire (de 33 à 40 %), à ce circuit de diffusion/distribution, ce sont entre 55 et 57 % qui sont prélevés sur le prix de vente public.

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Il n’est pas simple pour une revue au tirage modeste de séduire un diffuseur car quel intérêt a-t-il à assurer la commercialisation d’une centaine d’exemplaires d’une revue qui vaut 10 €  (qui lui rapportera donc un peu plus d’1 € par numéro vendu) vu la logistique qu’il doit mobiliser ?

Il existe bien entendu des diffuseurs spécialisés (Dif’Pop’, absorbé par Pollen), des structures un peu en forme coopérative (lespressesdureel, ouvrages sur l’art), des structures attentives aux revues (Les Belles Lettres) mais l’afflux de demandes qui leur est fait les contraint à se monter plus exigeants à l’égard des prétendants. En outre, il faut une cohérence entre les autres productions qu’ils présentent et votre propre projet.

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Si pourtant, vous réussissez à séduire un diffuseur, il y a différentes choses dont il faut vous informer : la réalité bien sûr de sa structure (combien de représentants ? combien de visites chaque année au réseau des libraires ? quels autres outils utilise-t-il ? dans quel délai vous réglera-t-il les ventes réalisées ?)


Vous pouvez lui demander quelle mise en place en librairie  il peut vous promettre, il ne pourra que vous répondre : « ça dépend ». Au moins peut-il estimer le nombre de points de ventes qu’il saura mobiliser à votre service.

Un diffuseur, afin de pouvoir effectuer correctement son travail de prospection, vous demandera des éléments de contenu de votre revue, plusieurs mois en amont (de 3 à 6 mois) de votre propre travail éditorial.

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Pensez également à accompagner le travail du diffuseur : rien ne vous empêche d’aller présenter chez un libraire votre revue si vous avez constaté son absence en le guidant vers votre diffuseur, voire de proposer une soirée autour de la sortie d’un numéro.

Gardez à l’esprit que si vous ne vendez que quelques dizaines d’exemplaires en librairie et que cela correspond à vos espérances, les services coûteux d’un diffuseur ne sont peut-être pas nécessaires.

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On trouvera les fonctions de distributeur et de diffuseur longuement détaillés sur le site du Syndicat national de l’édition : www.sne.fr

Les contrats d’éditeur

Beaucoup de revues souhaiteraient intégrer une maison d’édition pour bénéficier de son système de commercialisation, pour apparaître dans un catalogue qui les mettrait en valeur, pour s’alléger de toutes les tâches administratives…

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C’est évidemment une solution enviable, elle ne doit cependant pas dispenser d’une certaine vigilance à la signature du contrat d’édition.

La première précaution est de s’assurer que le titre continue à vous appartenir dans cette nouvelle donne : en cas de difficultés et de rupture, votre identité doit partir avec vous.

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Beaucoup d’autres points doivent vous alerter :

– décidera-t-il ou au moins interviendra-t-il sur la maquette de votre revue ?


– et le contenu, voudra-t-il un droit de regard ?


– qui se charge de la mise en page de la revue ?


– à qui appartiennent les stocks de votre revue ? à l’éditeur physique. Devrez-vous lui racheter si vous vous séparez ? Et à quelles conditions ?


– et l’ensemble des fichiers commerciaux : pensons aux librairies, vous les communiquera-t-il au moment de votre rupture ? Et les abonnés s’il se charge de leur gestion ?


– qui porte la demande de subvention ? Vous ou l’éditeur ? Si c’est l’éditeur en sera-t-il le bénéficiaire exclusif (pour l’impression et la gestion de votre publication) ou pourrez-vous en bénéficier pour partie (organisation de soirées, participation à des salons, édition d’une plaquette promotionnelle…) ?


– comment se répartissent les recettes sur les ventes ?


– disposerez-vous d’exemplaires gratuits – et combien ? – pour servir vos auteurs, faire votre propre promotion, compléter le service de presse de l’éditeur ?

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De fait, l’éditeur physique de votre revue devient son directeur de publication, donc son responsable légal.

L’éditeur vous demandera plusieurs mois à l’avance à la fois pour son planning de fabrication et pour la diffusion de ses nouveautés, suffisamment de contenu sur le numéro de votre revue à venir.

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Petites réflexions annexes

Éditeur ou pas, réfléchissez bien à la périodicité de votre revue. Serez-vous certains de pouvoir assurer le rythme trimestriel vers lequel va votre préférence ? C’est-à-dire avoir, à la parution d’une livraison, au moins un numéro largement constitué, voire deux en chantier… Difficile et intense ! Et donc, si vous prenez du retard, vous risquez de pénaliser votre publication auprès d’un éditeur, d’un diffuseur comme d’un abonné – voire de les décourager. Le respect d’une parution régulière est aussi une des conditions du renouvellement d’une subvention.


À l’autre extrémité, en quoi une revue annuelle reste-t-elle une revue ? Quelle forte identité la distinguera-t-elle d’un livre ? Et puis comment générer une fidélité, donc des abonnements, avec une publication aussi rare ?